Extrait :
-- LES MANIES DE DANIEL --
On a le temps là ?
Hein ?
On a le temps ou pas ?
Ha. Je demande.
Il va demander.
Est-ce qu’on a le temps ? … ha oui … le temps de quoi.
Ben le temps de s’attarder un peu sur les manies de Daniel
Ben le temps de… ha
Quoi
Ben on me fait signe que pas tant que ça.
Ah pas tant que ça.
C’est pas grave, le plus important c’est quand même de parler de se tête qui…
Pas maintenant.
Ah oui c’est vrai
Oui c’est vrai les manies c’est pas le plus important
Mais sans ça on peut pas dire la suite, non, on peut pas
On ne peut pas comprendre l’important si on ne sait rien de l’anodin
Hein ?
Euh… non rien.
…
(Contamination du jeu de tête à deux ou trois personnes)
-- LA MANIE DU MATIN --
(désignant celui qui veut toujours parler de la tête)Tiens ben pour celle-ci c’est toi qui feras Daniel.
Ho ! et pourquoi ?
Comme ça
Non mais on devait tous le faire celui là.
Oui ben commence pendant qu’on explique
Pis on te rejoindra
(celui qui a été désigné se place devant mais rechigne à commencer)
Allez vas-y.
On ne peut pas raconter si tu ne commences pas.
Je viens le faire avec toi. A deux, ça ne dérange personne
(il vient se placer à coté de celui qui a été désigné et miment chacun pour soi qu’ils reçoivent des coups.)
Tous les matins
Pendant que nous on faisait nos abdos
Ou des tractions, je préfère les tractions
Ou même certains matins où on ne faisait rien
Parce que certains matins ras-le-bol
Daniel lui tous les matins il sautait de son lit dès le réveil
A peine ouvert les yeux
Il sautait de son lit
Et il faisait ça
(ils montrent les deux qui miment de recevoir des coups. Peut-être, s’il y a encore des acteurs non occupés, peuvent-ils aller observer ça, comme une sculpture dans une musée)
J’y peux rien
Il disait tout le temps ça, tu te souviens.
Il prenait une petite pause de temps en temps et il répétait
J’y peux rien il faut que je le fasse j’y peux rien il faut que je le fasse
(ceux qui se remémorent ont soudainement les pensées ailleurs et on perçoit que leur tête commence à devenir lourde, très lourde. Les deux qui miment remarquent le silence, font une pause, voient ce qui est en train de se passer, il disent)
Ha non pas maintenant
(ceux qui regardent ceux qui miment ne comprennent pas. Ils disent)
Nous il nous faut la suite. Ben oui. Nous il nous faut la suite.
Alors tous les matins vous lui demandiez.
(ceux qui miment reprennent leur mime)
Daniel mais qu’est-ce que t’arrives
Qu’est-ce tu fous là Daniel
Ca va pas ?
Il faut que je le fasse j’y peux rien il faut que je le fasse
Nous à force ça nous faisait marrer
Et on redemandait chaque matin juste pour se marrer de l’entendre répéter
J’y peux rien il faut que je le fasse j’y peux rien
Et puis un matin
Oui un matin, c’était ce même matin où…
(ceux qui miment ce sont arrêtés, ils font comme des coureurs après l’entraînement)
Il s’est levé il s’est mis à la même place que les autres matins
Il nous a regardé longuement
Vous savez, les gars, quand je me réveille j’entends un voix que je connais bien qui me répète « la vie, quand on est comme toi, tu sais, la vie c’est plus simple si tu apprends à recevoir les coups ». Alors j’y peux rien il faut que je le fasse. Pour la faire taire, cette voix. Mais ce matin. Je suis fatigué, vraiment, je n’ai pas le courage. Alors si vous êtes d’accord je vais juste rester là, debout, un moment.
On n’a rien dit
Non on pouvait rien dire
Des mois que ça durait
On n’a rien dit.
On s’est regardé et on n’a pas su quoi dire.
Et les minutes ont vraiment paru plus longues que d’habitude,
D’habitude qu’elles sont déjà si longues ces minutes de matin.
…
Et puis il a commencé à tourner la tête…
Comme ça ?
Oui oui comme ça exactement comme ça !
Tu crois que c’était un signe ?
Un signe avant-coureur ?
Un signe annonciateur.
(ils haussent les épaules)
(ceux qui miment ou un de ceux qui miment)
Hé les gars on est dimanche aujourd’hui ?
Daniel !
Quoi ?
Tu déconnes.
Non on est bien dimanche aujourd’hui
Mardi. On est mardi.
C’est tout.
C’est tout ?
Et le lendemain pareil.
Mercredi, Daniel, on est mercredi.
Et ainsi de suite jusqu’à
DIMANCHE